
L’agro-écologie s’affirme comme une approche pour mettre à plat toute la consommation de l’eau par l’agriculture. Comment est-elle abordée en France, en Allemagne et au niveau européen ? 3ème partie d’une série de trois analyses des politiques publiques pour le projet « Rural Resilience ». Par Marie-Lise Breure-Montagne.
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Les agriculteurs composent avec quatre méthodes fondamentales de gestion des risques (climatiques ou autres) : acceptation (du risque) ; transfert (via l’assurance) ; réduction du risque (au cas par cas : chaufferettes dans les vignes etc…) ; et enfin : diversification. En phase de changement climatique avéré voire d’emballement : la diversification s’impose comme le levier le plus robuste d’adaptation au changement climatique, et aux bouleversements de disponibilité de la ressource eau qui l’accompagne.
Pour une gestion territoriale de l’eau : l’agro-écologie s’affirme comme une approche pour mettre à plat toute la consommation de l’eau par l’agriculture (photos 1-6, avec mentions de l’Agence de l’Eau Adour Garonne concernant l’agro-ecologie et la gestion quantitative de l’eau), où la diversification des productions, couplée à l’allongement des rotations, va se combiner à d’autres leviers plus classiques de gestion de la ressource eau. Comme l’indiquent les explications du réseau OSAE en France : « l’agroécologie est un terme utilisé pour définir un nouveau modèle agricole, alternatif au courant conventionnel actuellement dominant », la combinaison de plusieurs approches (dont la préservation de ressources-clés comme l’eau) favorisant in fine la résilience du système agricole (figure 1).

Dans cette 3ème partie, nous rappellerons d’abord comment cette révolution copernicienne, « seule utopie réaliste », s’est déroulée respectivement en Allemagne (années 2000) puis en France (2014-2016) -et surtout comment elle a pu s’institutionnaliser et s’ancrer. Puis nous verrons comment les approches préventives de crise majeure sur l’eau peinent tout de même à trouver leur légitimité au milieu de solutions curatives voire palliatives : le modèle agricole dominant, dispendieux en ressources devenues rares, l’eau, reste dans le déni de sa fin prochaine, malgré les symptômes qui s’accumulent. Enfin, nous discuterons de la manière dont la PAC, revenue dans le giron des Etats membres, prend en compte avec parcimonie l’agro-écologie, pourtant l’une des seules issues possibles à l’Everest ‘’changement climatique’’.
La déconnection de la PAC (ancienne ou nouvelle mouture) avec la gestion territoriale de l’eau prive l’Europe d’une trajectoire de résilience fondée sur l’agro-écologie et sa gestion économe et respectueuse des ressources locales, dont l’eau. C’est ce que la crise agricole française, partie du Sud de la France, indiquait -avant qu’elle soit instrumentalisée pour légitimer des solutions palliatives de gestion de l’eau.

Transition agricole en Allemagne dès les années 2000, agro-écologie en 2014-2016 en France : une difficile institutionnalisation
En Allemagne, la crise de la vache folle a servi de déclencheur : « Nous sommes face à un champ de ruines », déclarait Renate Künast en 2001, ministre de la Protection des consommateurs, de l’Alimentation et de l’Agriculture dans le gouvernement de Gerhard Schröder (coalition avec les Verts). Face à l’état de l’agriculture industrielle de l’Allemagne, déjà largement dédiée à l’élevage, les prises de position d’alors semble avoir contribué à mettre en circulation la notion de « transition agricole » (« Agrarwende »). « Le chancelier Gerhard Schröder promettait alors de dire ’’adieu aux usines agricoles’’. Si la réforme de la politique agricole initiée par les Verts n’a pas vraiment porté ses fruits aujourd’hui, le terme de « transition agricole » est passé dans le langage courant en Allemagne et désigne un changement de paradigme attendu dans l’agriculture qui, idéalement, devrait être écologique et durable ». Si la réalité est encore loin des attentes, lors des deux décennies écoulées, « des ONG environnementales et le groupe AgrarBündnis mobilisent l’opinion publique et font pression sur le gouvernement : L’idée d’un changement d’orientation nécessaire, voire exigé, du fonctionnement de l’agriculture allemande a depuis été adoptée par nombre de consommatrices et consommateurs ».
Le modèle agricole qui prévaut depuis les années 1960 se trouve remis en cause de l’autre côté du Rhin, mais avec plus d’une décennie de retard sur l’Allemagne : « La France promeut le développement de systèmes agroécologiques, définis depuis 2014, à l’article L.1.II du code rural et de la pêche maritime comme privilégiant « l’autonomie des exploitations agricoles et l’amélioration de leur compétitivité, en maintenant ou en augmentant la rentabilité économique, en améliorant la valeur ajoutée des productions et en réduisant la consommation d’énergie, d’eau, d’engrais, de produits phytopharmaceutiques et de médicaments vétérinaires, en particulier les antibiotiques. Ils sont fondés sur les interactions biologiques et l’utilisation des services écosystémiques et des potentiels offerts par les ressources naturelles […]. Ils contribuent à l’atténuation et à l’adaptation aux effets du changement climatique ».

Agro-écologie : une discipline scientifique en Allemagne, et un ensemble de pratiques en France
Outre ce retard de la France pour ancrer les bases d’une remise en question du modèle agricole dominant par l’agro-écologie, des chercheurs mentionnent des différences plus subtiles : « Wezel et al. (2009) considèrent que l’agroécologie comporte trois volets : une discipline scientifique, un mouvement social et un ensemble de pratiques. Ces trois aspects ont des poids relatifs différents selon les contextes : en France, la pratique est fortement mise en avant ; en Allemagne, c’est la discipline scientifique, et au Brésil, c’est le mouvement social [de défense d’une agriculture familiale, à taille humaine]. Il est nécessaire de développer ces trois dimensions de manière intégrée, en particulier pour favoriser une approche transdisciplinaire et systémique »1.
Cette analyse fait écho à ce qu’indique l’INRAE (Institut national de la Recherche Agronomique), citant pas moins de trois grands partenaires allemands dans la recherche sur l’agro-écologie : Universités de Hohenheim, de Munich et VTi, ainsi que le vecteur indispensable de collaborations scientifiques que constitue le programme européen HORIZON 2020. L’initiative de recherche allemande la plus saluée : « l’expérience des ‘’biodiversity exploratories’’ [financées par la fondation DFG] en Allemagne semble particulièrement pertinente pour cette thématique [de l’agro-écologie] et des collaborations pourraient se renforcer ».
Côté français, plus centré sur les pratiques agro-écologiques, les CIVAM constituent un réseau de près de 130 associations et qui œuvrent depuis 60 ans pour des campagnes vivantes ; ils sont un des acteurs les plus ancrés dans le territoire et les plus actifs sur l’agro-écologie (voir leur communiqué de presse pendant la crise agricole de janvier 2024, incitant à « garder le cap nécessaire de la transition agroécologique » ; voir figure 6 bis la contribution d’un CIVAM à la mise en œuvre des MAEC : Mesures Agro-Environnementales et Climatiques du Pilier 2 de la PAC).
Le réseau rural français, tête de pont des programmes LEADER en France, fait également partie des acteurs diffusant les pratiques agro-écologiques en France.
Une sociologue rurale de l’INRAE, Véronique LUCAS étudie « les conditions techniques, territoriales et collectives de la transition agroécologique des agriculteurs à partir de situations de coordination / mutualisation de moyens / reconnexions territoriales entre cultures et élevage ». Cette chercheure met en avant leur caractère diffus voire quasi invisible de ces multiples pratiques (individuelles / collectives / territoriales) et fait remonter pendant la crise de janvier 2024 cette « agro-écologie silencieuse ». On comprend entre les lignes de son plaidoyer pour « une véritable politique d’accompagnement en faveur de la transition écologique », une critique à peine voilée du système de co-gestion à la française (ministère de l’agriculture et ses services déconcentré / syndicat majoritaire). (source).
Si l’agro-écologie et ses pratiques sont disséminées un peu partout : cette approche est-elle pour autant ancrée, par des politiques de soutien adaptées ? Avant de conclure cette partie avec les MAEC (Pilier 2 de la PAC), nous allons appliquer une typologie des mesures en faveur d’une gestion territoriale de l’eau. Certains auteurs ayant eu la bonne idée de faire un parallèle avec le vocabulaire médical des grandes pathologies mortelles : force est de constater que les mesures palliatives sont encore privilégiées.

Mesures curatives / préventives / palliatives d’économies d’eau en lien avec l’agriculture : même sens de l’urgence des deux côtés du Rhin ?
L’agro-écologie est notamment constituée de mesures curatives des maux du modèle passé (un bon exemple étant celui de la réhydratation des prairies, pour sortir de la culture du maïs), puis de mesures préventives (nouvelles approches territoriales négociées pour préserver la ressource en eau), pour affronter le gros de l’impact des crises climatiques à venir.
L’agriculture conventionnelle se vautre encore dans des solutions palliatives, sans prendre conscience de leur caractère mortifère : comme le montre le Lot-et-Garonne, l’un des épicentres de la crise agricole de janvier 2024. L’inter-connexion entre zones plus ou moins bien desservies par la ressource (planifiée en Allemagne pour les années à venir : voir 2ème partie de l’analyse) est aussi à considérer comme une mesure palliative.
La crise agricole de janvier 2024, outre le drame de Pamiers (deux femmes d’une même famille mortes), a été particulièrement aigue à Agen, ville préfecture du département du Lot et Garonne, avec des images impressionnantes de dégradation. Colère liée à la concurrence déloyale des importations, au travail harassant pour les exploitants agricoles, à la complexité des rouages administratifs de la PAC : certes. Ce chaos de déchets agricoles, en Lot-et-Garonne, résulte aussi d’une sortie d’un rapport de la Cour Régionale des Comptes sur la gestion de la Chambre d’Agriculture. Sorti le 19 janvier 2024, il retrace une situation tendue sur la ressource eau :
« Le département du Lot-et-Garonne se situe dans un bassin hydrographique où les ressources en eau se raréfient. Les filières agricoles [du département] dépendent déjà largement de l’irrigation, sujet majeur pour la chambre départementale, au cœur de son projet de mandat […]. Le Lot-et-Garonne compte 4 000 lacs collinaires pour un total de 100 millions de m3 d’eau retenue. Une retenue alimente en moyenne de 30 à 80 ha de terres agricoles. Le projet de Caussade, dont les dimensions sont bien supérieures à la moyenne, est ancien mais il est redevenu central dans les préoccupations départementales agricoles à partir de 2011 ».
Puis le rapport détaille comment cette construction d’infrastructure a été menée à son terme malgré son caractère illégal, et toujours en place en 2023. La poursuite du projet s’est réalisée en dépit du retrait de l’autorisation (en septembre 2018), par le ministre de la transition écologique et le ministre de l’Agriculture, constatant la non-conformité avec le SDAGE (Schéma Directeur D’Aménagement et de Gestion des Eaux, par bassin hydrographique : le document de référence de la politique eau en France).
Mais ce n’est pas tout : « La sincérité des budgets est altérée par l’inscription d’informations inexactes. C’est le cas de l’inscription de la redevance irrigation dans le budget de l’OUGC [organisme unique de gestion collective dédiée à l’irrigation] qui n’est jamais appelée. Cela a été le cas également pour le second budget révisé de 2018 et le budget initial de 2019 qui n’ont délibérément pas fait apparaître les dépenses relatives à la construction de la retenue d’eau de Caussade ».
Malgré la récurrence et la gravité des irrégularités de gestion de l’organisme unique, la Cour constate que l’État a tardé à réagir, en n’engageant la destitution de la chambre départementale de son portage de l’organisme unique qu’en 2023. On connait tous la suite : parmi les mesures dites simplificatrices, les demandes d’autorisations pour les retenues collinaires vont être facilitées ! Quoi en pense la Cour des Comptes, qui représente les citoyens contribuables.

Les éco-régimes sont la nouvelle innovation pour verdir la PAC … mais sont laissés à la discrétion des Etats membres.
En France, des chercheurs de l’INRAE ont étudié les conditions d’accès à ces éco-régimes. Leurs constats montrent le manque d’ambition du PSN français :
« Un accès très aisé au premier niveau CE2+ de l’éco-régime : Selon nos calculs, 99,6% des exploitations agricoles métropolitaines respectent les exigences de la certification CE2+ ; environ 35,5% des exploitations accèderaient au niveau supérieur des éco-régimes sans changement de pratiques »
Le différentiel entre le niveau standard et le niveau supérieur étant de 22€/ha et les modifications à atteindre étant mineures…une réforme pour rien. A été négligé le renforcement des MAEC (contrats environnementaux du 2nd pilier de la PAC)
PAC, PSN & co : le minimum en faveur de l’agro-écologie ?
Pour accompagner la transition agroécologique, mieux intégrer politique de l’eau et politique agricole européenne est l’un des leviers régulièrement évoqués : « Le caractère structurant de la politique de l’eau impose d’assurer sa cohérence avec les autres politiques publiques au premier rang desquelles la politique agricole » (octobre 2021).
En Europe, rappelons que l’agriculture est responsable d’environ 25% des prélèvements d’eau totaux (le pic d’utilisation en été peut être de 90%, notamment dans les zones méditerranéennes). Les spécialistes de l’irrigation raisonnent avec les réflexes de pensée des trente glorieuses, « pipe technologies » en tête : « Face au changement climatique, réaliser des économies d’eau dans ce secteur est aujourd’hui une priorité, notamment par des changements de matériel et de pratiques d’irrigation ».
Remettre en cause les choix de système de production ne fait pas encore partie des options. « La PAC nécessite de réfléchir à différentes échelles, allant de la parcelle cultivée à des enjeux internationaux, en passant par le système de culture et d’élevage, l’exploitation agricole ou bien le territoire ». Ainsi en est-il aussi pour la politique de l’eau : à l’échelle de la parcelle et des rotations (cultures plus ou moins gloutonnes en eau, donc en irrigation, avec un système racinaire restaurant ou non la structure du sol pour bien le recharger en eau ; du bassin de production -sauf à commencer à recourir aux solutions palliatives de sur-exploitation mortifère de la ressource) ; et bien sûr à l’échelle internationale, avec ses nappes phréatiques qui s’épuisent un peu partout, ce qui pourraient déclencher un véritable tsunami d’effets domino.

Mais « L’agroécologie [ainsi que ses bénéfices sur la gestion de l’eau] fait partie à ce jour des grandes absentes [de la PAC], l’immense majorité des soutiens ne tenant pas compte des interactions entre productions animales et végétales, de l’allongement des rotations, du bouclage des cycles du carbone ou du phosphore, de la réduction de l’emploi d’intrants chimiques ou encore du rôle de l’arbre dans les agroécosystèmes [tellement essentiel pour soutenir le niveau de précipitations dans un climat changeant] […] la PAC se contente du minimum. L’émergence […] de la durabilité des pratiques, n’a pas substantiellement modifié la PAC : conditionnalité (2003) et verdissement (2013) ne dessinent qu’une durabilité faible qui ne remet pas en cause le paradigme productiviste dominant ».
Sans oublier le changement de 1992 qui fait passer la PAC « d’un système de soutien par les prix des denrées agricoles à un système de soutien au revenu, ou à l’hectare », qui fait le lit de l’agrandissement des exploitations et de la recherche d’économies d’échelle. Quand l’agroécologie propose quant à elle concepts et approche pour doter l’agriculture familiale, plus résiliente, d’outils robustes pour les temps qui viennent (rapport du CESER, 2016).
« Par le biais du développement rural (2ème pilier), 15 % des aides de la PAC sont ciblés en faveur des systèmes de production attentifs à ces aspects, ce qui ne peut évidemment pas contrebalancer les 85 % restants accordés de manière trop erratique. Une partie des aides du 2ème pilier est consacrée à des Mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) mais le montant alloué est insuffisant pour une incitation d’ampleur à la transition agroécologique. Leur mobilisation n’est possible que sur des zonages restreints prioritaires au plan environnemental : elles ne peuvent contrebalancer le poids des aides directes du premier pilier (aide à la surface) » (d’après A. Kirsch, J.C. Kroll, A. Trouvé, « Distribution des aides de la PAC et bonnes pratiques environnementales», INRAE Dijon, cité par le rapport CESER Nov. 2016)
Stéphane LE FOLL, ancien ministre français de l’agriculture, est le père du Plan agroécologique pour la France en 2013, et de la Loi d’avenir pour l’agriculture et la forêt en 2014 (référence explicite à l’agroécologie dans l’article premier du Code rural). Il fait partie de ceux qui s’insurgent contre la tendance à la renationalisation de la PAC ainsi que son manque d’ambition en matière de transition agroécologique (voir aussi figures 2 et 2 bis résumant les positions de la Cour des Comptes et le résultat final du PSN français, très décevant sur les écorégimes L’accès à l’éco-régime français de la PAC par la voie de la certification environnementale | Cairn.info et les MAEC).

Quatre types de MAEC proposés (pour la programmation 2023 – 2027) ; le Ministère de l’Agriculture via ses services déconcentrés reste l’autorité de gestion :
– MAEC SYSTEME qui s’applique sur au moins 90% de la Surface Agricole Utile de l’exploitation
– MAEC LOCALISEE qui s’applique à l’échelle parcellaire
– MAEC forfaitaire « bas carbone » qui s’applique sur une démarche d’amélioration de l’empreinte carbone (voir exemple ci-après : MAEC transition des pratiques)
– MAEC hors surfacique qui vise l’apiculture et la protection des races menacées.
Dans les régions méditerranéennes (Occitanie et Sud-Ouest), les agences de l’eau (par la voix de leurs ingénieur.e.s, aux avant-postes de la raréfaction de l’eau) ont essayé de faire entendre une autre voie que celle du ministère de l’agriculture (lui-même toujours très aligné sur les positions du syndicat majoritaire), lors des concertations régionales sur le Plan Stratégique National français. Espoir vite douché : « C’est plié pour 6 ans », vous disent en OFF des agents de l’agence de l’Eau Adour Garonne.

Si politiques et techniciens s’accordent sur l’insatisfaisante ambition de la PAC sur l’eau, reste tout de même le petit monde de l’irrigation qui en vantait les mérites : « Au sein même de la PAC (Politique agricole commune), il y a toujours eu des mesures pour favoriser les investissements durables sur l’eau. C’est le cas par exemple de l’article 46 du R.1305/2013 qui sur la période 2014-2020, stipule que les aides à l’irrigation ne peuvent être attribuées que dans les situations générant des économies d’eau et n’affectant pas son bon état. Si l’on parle du lien entre l’irrigation et la future PAC 2020, une proposition de la Commission (plus restrictive en comparaison avec l’actuelle programmation en accord entre l’agriculture et l’environnement) a été faite et envoyée au Parlement européen et au Conseil pour discussion […] Le Conseil a cependant déjà fait une proposition d’amendements pour davantage conditionner les investissements aux résultats d’études environnementales ex-ante sur la pression des masses d’eau pour que la démonstration soit faite de l’absence d’effets négatifs. Ceci alimentera la nouvelle PAC qui aura des conditionnalités environnementales plus restrictives en faveur d’une agriculture plus durable ».
Le rapport de la Cour Régionale des Comptes sur la situation (palliative) dans le Lot-et-Garonne, détaillé ci-dessus, montre à quel point nous sommes très loin de ces intentions louables.

Conclusion : quid des mesures annoncées le 26 janvier 2024 pour faire face aux protestations des agriculteurs ?
Tous ceux qui sont déjà inquiets de la cécité de la PAC vis-à-vis du changement climatique en général, et de la ressource eau en particulier, n’ont pas manqué de sursauter quand le jeune premier ministre français a annoncé, parmi « les 10 mesures de simplification », une brochette d’entre elles se rapportant à de véritables renoncements sur la gestion de l’eau. « Lutter contre tout ce qui peut entraver vos projets : retenues collinaires, bassines et autres […] accélérer les procédures […] créer une présomption d’urgences […] faire du Préfet l’interlocuteur privilégié pour les [sujets] irritants [et pour les irrigants du même coup] » : même le positionnement des Agences de l’eau sur le temps long, qui tarde à produire une réelle bifurcation, a pris l’eau -pour faire un mauvais jeu de mots.

Sans être grand spécialiste de la PAC, on peut s’étonner d’un des nombreux contrastes entre le pilier 1 (pas de plafond dans le PSN de la France, l’UE ayant laissé chaque état membre souverain sur ce plan) ; en revanche des plafonds, plutôt très bas, sur les MAEC « EAU SOL CLIMAT » (figure 6 bis) : clairement, le pilier 2 est sous-dimensionné par rapport aux enjeux.
Si le pilier 2 ne peut servir à connecter politiques agricoles et politiques de l’eau : comment faire ? Tout se passe comme si une grande partie de la profession agricole, et des décideurs publics n’avait pas compris quels effets allait avoir l’emballement climatique. Demeure la croyance que quelques mesures symboliques comme les MAEC sous rémunérées allaient servir d’antidote à un phénomène naturel devenu incontrôlable (et bien sûr, la foi en le « progrès », un peu trop optimiste comme vu en partie 1). En phase de renationalisation de la PAC, les diverses alertes de la Cour de Comptes de chaque pays mebre (seul acteur écouté ?) apparaissent comme un moyen de mieux toucher le microcosme bruxellois.
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